C’est peu de dire que FFVII Rebirth était attendu au tournant. Principalement pour deux raisons : la première, c’est bien sûr son statut de remake d’un jeu culte. Même sans y avoir joué, difficile de n’avoir jamais entendu parler de Final Fantasy VII. Au-delà de l’amour inconditionnel que lui porte toute une génération de joueurs, c’est aussi un marqueur fondamental dans l’évolution du jeu vidéo. Par ses visuels révolutionnaires pour l’époque, mais surtout pour ce qu’il a apporté à la narration. Il a poussé le jeu vidéo un cran au-dessus dans la façon de raconter ses histoires. Avec en plus son propos avant-gardiste sur l’écologie et son histoire plus complexe qu’elle n’en a l’air au premier abord, c’était vraiment un jeu unique à l’époque. Encore aujourd’hui, peu peuvent se targuer d’avoir eu autant d’impact sur l’industrie.
La deuxième raison, principale préoccupation de beaucoup de joueurs, c’est que la première partie n’avait pas fait l’unanimité. C’est même peu de le dire : entre ceux qui n’aiment pas les partis pris dans le remake, ceux qui l’apprécient mais lui trouvent trop de défauts et ceux qui le rejettent en bloc, il reste finalement assez peu de place pour ceux ayant entièrement adhéré à sa proposition. Personnellement, je fais partie de la deuxième catégorie : j’ai beaucoup aimé l’aventure, mais je trouve qu’il y a beaucoup à redire. Les quêtes secondaires franchement dispensables, l’écriture parfois caricaturale, l’IA des alliés insupportable et les niveaux étirés à rallonge sans raison m’ont poussé à me dire que le jeu était loin d’être parfait. S’il y avait bien des aspects que je trouvais vraiment cool, notamment le système de combat et les cinématiques, je ne peux pas m’empêcher de me dire que faire un jeu de 30 ou 40h seulement sur Midgard, c’est vraiment tirer sur la corde.
Et du coup, Rebirth, il lui incombe la tâche de mettre tout le monde au diapason avant l’arrivée de la troisième et dernière partie de ce remake. Les questionnements foisonnent parmi les fans, tant sur la direction que va prendre la narration que sur la construction du monde. Dans l’original, cette partie du jeu correspond à un long voyage à travers le monde, le moment où on découvre des tas de villes, des tas de mini-jeux et des tas de personnages tous intéressants à leur manière. Évidemment qu’on se demande tous comment peut être transposé le game design d’un JRPG des années 90 à un jeu moderne, et évidemment qu’on avait tous hâte de revivre cette sensation d’aventure. Mais Rebirth… est un voyage artificiel.
Construire un monde ouvert qui réussit à maintenir notre intérêt sur des dizaines d’heures, c’est quelque chose dont peu de studios sont capables. Si on prend un peu de hauteur et qu’on regarde ceux qui sont conventionnels, on retrouve toujours la même structure. Des tours à activer, des quêtes FeDex, des bonus à trouver en suivant des points d’interrogations sur la carte, des collectibles et une tonne de loot, vous voyez de quoi je parle si vous avez joué à un jeu Sony ou Ubisoft durant ces 10 dernières années. Et, pour une raison que j’ignore, Square Enix a choisi ce format pour Rebirth.
Honnêtement, c’est un choix que je ne comprends pas. Parce qu’on se retrouve une fois de plus face à la soupe habituelle qu’on nous sert quand un monde n’est pas assez bien construit pour être organique. Au tout début, c’est entièrement linéaire, et les pires heures de Remake nous reviennent en tête instantanément. Fort heureusement, ça se justifie par le scénario puisqu’on est dans un flashback. Et ça ne dure pas très longtemps. Dès qu’on sort de la ville de Kalm avec l’objectif de poursuivre Sephiroth, le monde s’ouvre à nous et on peut aller où on veut, ou presque. Quand on ouvre la carte, on remarque trois choses : la première, c’est que la zone est immense. Et ça va être comme ça tout le jeu. À chaque fois que j’arrivais dans un nouvel endroit, je faisais une syncope devant ma télé. Je me sentais submergé par la taille de ces zones qui me semblaient interminables.
La deuxième, elle ne saute pas tout de suite aux yeux, mais en regardant de plus près, on se rend compte que ces zones sont en fait découpées en plusieurs parties, et on finit rapidement par découvrir que la progression est cohérente. C’est pas très grave, on se doute qu’on aura un moyen d’y aller plus tard, sans doute pour terminer les activités optionnelles qu’il nous reste. Et la troisième, celle qui fâche, ce sont donc ces icônes qu’on voit à peu près dans tous les mondes ouverts, désormais désuets.
Allons donc gaiement grimper des tours, taper des monstres, récupérer trois tonnes de loot tous les 10 pas, fouiller des ruines, et autres éléments tertiaires totalement anecdotiques. Zelda Breath of the Wild est sorti il y a maintenant sept ans, Elden Ring depuis un peu plus de deux ans, et pourtant les développeurs ont choisi de s’inspirer de ce qu’il y a de pire. Le terme est un peu fort, parce que ces activités en soi ne sont pas mauvaises. J’y reviendrai un peu plus tard, mais elles ont plus d’intérêt que ce qu’on pourrait croire au premier abord. Mais c’est pas là qu’est le problème. Le problème, c’est d’avoir choisi une formule déjà vue cent fois, déjà poussiéreuse et qui donne une impression de copié-collé assez irritante.
On perd toute notion d’exploration organique. Ce n’est pas comme dans Elden Ring ou Zelda, où on peut voir quelque chose au loin qui nous intrigue et nous invite à l’aventure. Là, ça devient une todo list rébarbative zone après zone. Que ce soit à 5h de jeu ou à 50, on va monter les mêmes tours, on va aller chercher les mêmes puits, on va faire exactement la même chose tout au long du périple. Dans des décors différents, avec quelques variations dans certains cas, mais in fine, on fait toujours la même chose.
On dirait presque que FFVII Rebirth a tout compris de travers. Parce qu’il s’inspire bien de Breath of the Wild, mais pour la pire partie, à savoir galérer pour choper sa monture. Avoir un chocobo, c’est quand même super pratique. On va beaucoup plus vite, on ramasse ce qu’il y a sur le chemin par pack plutôt que de tapoter triangle, ils sont indispensables pour accéder à certains lieux, et on a quand même droit au plus grand plaisir du jeu, à savoir savourer la vision de Red qui se tient droit sur sa monture. Mais pour en profiter, il faut se taper une phase de pseudo-infiltration pénible et beaucoup trop lente. Et ce n’est pas le seul tracas qu’on a avec eux : suivre une piste, creuser pour trouver des trésors, tout ça est long et surtout pas fun pour un sou. Je m’en serais passé volontiers, même si je préfère ça largement à Chadley.
Ah, Chadley, ce personnage insupportable dans FFVII Remake. Rassurez-vous, il l’est encore plus dans Rebirth. Celui qui devait servir de fil conducteur lors de l’exploration devient juste une voix agaçante au possible qui me forcait à tapoter frénétiquement ma manette parce que je n’en pouvais plus. Si encore il nous parlait tout le temps pour nous dire des trucs intéressants, passe encore, mais là on est loin du compte ! Chacune de ses lignes de dialogue ne sert absolument à rien, si ce n’est donner envie de couper le son le temps que ça se termine. Il ne fait que rendre chaque action plus lente, il nous coupe dans l’action, nous parle en plein combat pour nous raconter ce que la matéria Analyse nous montre déjà, tout ça pour… Je ne sais pas, mais c’est vraiment infernal. Et le pire, l’immondice la plus totale et absolue, c’est que le réglage initial fait sortir sa voix de la DualSense ! Autant dire qu’au-delà de l’agression sonore la première fois que ça arrive, il vaut mieux changer très vite cette option pour le bien de votre santé mentale.
Et cerise sur le gâteau, les quêtes secondaires sont du même acabit que celles de Final Fantasy XVI. Pas celles vers la fin du jeu qui servent à creuser les personnages et sont intéressantes à suivre, celles du début où on vous demande d’aller livrer le courrier. Elles sont de ce niveau, mais en plus long et en pire. Laissez-moi vous donner deux exemples : dans la première zone, on rencontre une personne qui veut réparer son moulin. Manque de bol, il lui manque une pièce bien spécifique. Simple, non ? Non, pas du tout. Là, il faut aller chercher la puce permettant de la construire. Oui parce que Rebirth a un système plutôt basique d’artisanat, mais il est efficace : on récupère des puces, qui sont l’équivalent des recettes, qui permettent de fabriquer des objets à condition d’avoir les ingrédients. On en récupère la plupart naturellement en se promenant avec la tonne de loot partout, c’est donc jamais problématique. D’ailleurs, l’aspect RPG au global de Rebirth est relativement simple, mais bien dosé : on a la main sur les matérias et trois pièces d’équipement, et on débloque des améliorations avec le niveau d’équipe. Rien de très compliqué donc, mais qui permet malgré tout d’ajuster sa stratégie dans les combats.
Pour en revenir à la quête secondaire, une fois la puce obtenue après s’être servi de notre chocobo comme un chien pisteur, on voit qu’il nous faut un ingrédient spécifique qu’on trouve pas à tous les coins de rues. Parce que oui, c’est le boss de la zone, qu’on ne peut combattre qu’après avoir découvert tous les puits de vie. Pour finir cette quête secondaire, il faut donc ratisser la zone. Et le pire, c’est qu’une fois qu’on a tout ça et qu’on pense en avoir fini, il faut retourner en ville pour transmettre un message ! Apparemment, Cloud n’est pas seulement mercenaire, il est aussi facteur.
L’autre exemple se situe plus loin dans le jeu. À un moment, on sauve un oiseau tout mignon qu’on surnomme ChoupiCloud de par sa ressemblance fortuite avec le soldat. En revenant un peu après en ville, des enfants nous apprennent qu’il a disparu et en bon samaritain, impossible de ne pas les aider. Sauf que les aider signifie aller poser trois pièges à oiseaux à trois endroits différents, après avoir récupéré la puce qui permet de créer l’appât. Et puis, comme ça serait trop simple comme ça, une fois le trajet effectué, il faut retourner à chacun des pièges pour voir si ChoupiCloud y est, et comme ça serait trop simple comme ça, chaque piège a bien sûr attiré des monstres qu’il va falloir combattre.
Avec ça, je pense que vous avez l’idée. Toutes les quêtes secondaires ne sont pas comme ça, certaines sont plus sympas que d’autres, certaines sont plus courtes ou plus étoffées narrativement parlant, mais on s’en serait aisément passé dans la grande majorité des cas. Le seul élément positif qui en ressort, c’est qu’elles sont souvent liés à un personnage du groupe en particulier, ce qui nous permet donc d’avoir quelques dialogues en plus. Par exemple pour ChoupiCloud, c’est Barrett qui est en charge de l’affaire. Mais honnêtement, ça pèse pas bien lourd dans la balance, et j’en ai abandonné plusieurs par flemme de faire des allers-retours, même si le voyage rapide est très efficace avec des points de téléportation bien répartis.
Il ressort donc de tout ça une exploration artificielle. On a une liste de course, qu’on peut faire ou pas selon nos envies. Cette structure n’invite pas vraiment à s’y investir, parce que ça sent le réchauffé. Après, tout n’est pas à jeter non plus : si on se donne la peine, on découvre quelques bonnes surprises. Les boss secrets par exemple sont souvent très sympas, il y a tout un scénario annexe assez mystérieux autour d’éléments nommés proto-reliques, et plus globalement faire ces activités peut s’assimiler à des respirations entre deux événements importants dans le scénario. Mon plus grand reproche, c’est simplement d’avoir copié ce qui se faisait sans remettre en question un modèle maintes fois critiqué. De ne pas avoir imaginé autre chose, de ne pas avoir pris de risque. De rendre l’exploration fade, alors que le monde de Rebirth est magnifique. Parce que oui, le voyage dans Rebirth est artificiel à cause de ça. Mais il est aussi captivant, et surtout, il est beau.
Après avoir lu ce qui ressemble presque à un pamphlet, le contraste va peut-être être un peu abrupte. Mais au-delà de tout ce que j’ai pu dire jusque-là, FFVII Rebirth est captivant. À commencer par le monde qu’il dépeint : qu’on se mette d’accord, on est loin d’un monstre technique. Les textures bavent souvent, notamment la roche qui est rarement à son avantage. Les effets de lumières sont ratés pour la plupart, les animations parfois un peu crispantes, notamment lorsqu’on grimpe ou qu’on court un peu partout. Rebirth ne tient absolument pas la comparaison avec FFXVI, la faute sans doute à l’Unreal Engine 4 qui commence à avoir fait son temps. On a aussi quelques fois des problèmes de caméras ou de pathfinding. On a une physique aux fraises. Dès qu’on marche sur une terrasse on fait tout valdinguer comme si on était Hulk.
Mais tout ça, c’est du détail. Forcément, en faisant une énumération des défauts que j’ai remarqué, on dirait que rien ne va. Mais il suffit de regarder un paysage, de voir la diversité complètement folle des environnements, le charme des villes, les cinématiques aussi incroyables dans leurs mises en scène que dans leur sens du détail pour admettre l’évidence : FFVII Rebirth est beau. J’ai vu passer des avis critiquant les visuels du jeu, mais je ne comprends pas comment on peut se dire ça. Même si y a quelques petits ratés, chaque zone est tout bonnement magnifique, parfois au prix de la lisibilité dans certains environnement surchargés. Simplement avec ses paysages, Rebirth invite au voyage et à l’aventure.
Aucun biome n’est vraiment original : la jungle, la plage, le désert, la prairie, etc. Et pourtant, il se dégage quelque chose d’unique. Peut-être est-ce dû aux musiques qui sont tout bonnement l’un des meilleurs point du jeu. Elle s’adapte constamment, chacune d’entre elles possède un thème en fonction de l’instant. Quand on passe de l’exploration au combat, elle s’envole et nous emporte dans un flot d’émotions. Parce que le travail effectué sur la réorchestration est tout bonnement impressionnant, il m’est plusieurs fois arrivé de simplement poser la manette pour me concentrer pleinement dessus. Remake faisait déjà fort à ce niveau, Rebirth le surclasse totalement. N’ayant pas des connaissances musicales très poussées, je ne saurais pas expliquer pourquoi ça marche si bien, mais ce qui est sûr, c’est qu’elle va passer dans mon casque pour un long moment. Le seul bémol vient du mixage, où les musiques prennent souvent le pas sur les voix. Ayant fait le jeu en VF sans sous-titres, j’ai loupé plusieurs fois des phrases qui étaient trop effacées par rapport au reste.
En parlant de voix d’ailleurs, le doublage est plutôt chouette, même si j’ai eu du mal à m’y habituer. Je trouve qu’il manque de naturel, parfois en forçant le ton sur certaines répliques. Du coup, ça crée un décalage étrange entre la gestuelle du personnage et sa façon de parler. Ça se remarque notamment sur Yuffie qui est très expressive. Par curiosité, j’ai aussi essayé les voix anglaises et les voix japonaises, mais le constat est le même, j’ai donc décidé de rester sur le français pour le confort. Et j’ai fini par m’y faire, et même par m’attacher aux voix que j’ai entendus pendant des dizaines d’heures. Sauf celle de Barrett, qui est toujours beaucoup trop agressif quand il parle, même quand il est gentil. Au passage, si vous ne l’avez pas toujours pas fait et hésitez sur le choix de la langue, je vous déconseille l’anglais, que ce soit à l’oral ou dans les sous-titres. La traduction américaine prend énormément de liberté avec le script d’origine en changeant profondément le sens de certains dialogues.
Pour en revenir à cette notion de voyage, c’est constamment au cœur du jeu. Ça passe forcément par le scénario qui nous emmène dans une multitude de lieux très divers, mais aussi par le découpage en zone qui est vraiment efficace pour créer de la nouveauté. Je ressentais à chaque fois ce frisson d’excitation, du moins après la syncope en ayant ouvert la carte et me sentir totalement démuni face à l’immensité du monde. Sauf qu’en fait, les développeurs ont une maitrise des distances assez impressionnantes. Parce que oui, traverser la zone à pied prend un temps fou, c’est vraiment grand. Mais dès qu’on a un chocobo et qu’on peut sprinter, on avale les mètres vitesse grand V et on se rend compte que finalement, c’est pas aussi long que ce qu’on pourrait croire. La facilité déconcertante avec laquelle on se déplace a vraiment été une agréable surprise, qui s’éloigne pour le coup des mondes ouverts habituels. Et bien sûr, ça reste toujours une petite claque d’arriver à un endroit, avec son ambiance bien à lui, ses couleurs chatoyantes, la hâte d’arriver en ville et se prendre à nouveau une petite claque tant elles sont belles. Cette partie du voyage dans le FFVII original était marquante, et Rebirth l’est tout autant.
Et puis bien sûr, ça passe aussi par le gameplay avec la tonne de mini jeux, dont certains directement intégrés à l’histoire principale. Tout comme dans l’original, on découvre pleins de gameplay différents, certains étant d’ailleurs largement meilleurs que d’autres. On a un jeu de tir, du rail shooter, de la course de chocobo, du piano, un jeu de stratégie, un jeu inspiré de Fall Guys avec des grenouilles, la séquence de moto dans FFVII Remake, et j’en passe. Et vous inquiétez pas, j’ai même pas énuméré le tiers des activités disponibles. Cette abondance de mini jeux contribue aussi à sa manière à un renouvellement constant : on se demande toujours quel sera la prochaine idée des développeurs. Alors oui, c’est pas toujours très amusant, mais ça a dans tous les cas le mérite d’apporter une diversité qu’on voit pas souvent. Et puis il y a bien sûr le Queen’s Blood, ce jeu de carte qui rappelle obligatoirement le Gwent dans The Witcher 3. C’est un jeu très pensé, avec une bonne dose de stratégie, et je pense que les fans de deck-building y trouveront facilement leur compte. Et la cerise sur le gâteau, c’est qu’en plus il y a une narration plutôt cool autour du mini jeu avec une suite de quête vraiment très intrigante. C’est aussi le cas pour une des activités secondaires, qui consiste à trouver des proto-reliques, l’occasion de découvrir d’autres mini-jeux. La suite de quête associée est d’ailleurs un joli clin d’œil pour les fans.
Quand on prend le temps de regarder derrière nous au bout d’un certain temps, on se rend compte du chemin parcouru et de la tonne de souvenirs qu’on a déjà. C’est marrant, parce que j’y vois là une version réussie de ce qu’essayait de faire Final Fantasy XV. Dans l’idée, c’est la même structure : un début qui ressemble à un road trip, avant d’être rattrapé par des enjeux qui dépasse les personnages. Sauf que, dans FFXV, cette partie était loupée parce que les déplacements n’avaient rien d’intéressants. Mais on retrouvait malgré tout cette idée de vaste monde qu’on parcourt entre amis, découvrant de nouvelles zones, de nouvelles villes, aux côté d’un groupe qu’on apprend à aimer.
Dans Rebirth, j’ai eu du mal à m’attacher aux personnages. C’était déjà le cas dans Remake : Cloud a l’intelligence émotionnelle d’un ado en pleine crise, Tifa et Aerith ont l’air un peu cruches, Barrett crie tout le temps sans qu’on sache trop pourquoi. Red est cool, mais comme il parle pas des masses, on va dire qu’il ne compte pas. Quand Yuffie arrive, elle est encore plus exaspérante que le reste du groupe, et on se dit qu’on devrait peut-être retourner sur Like a Dragon pour retrouver des personnages intéressants. Mais au fur et à mesure qu’on progresse, que les enjeux se dessinent et que les personnages se livrent, on leur découvre une profondeur inattendue, du moins si on a pas touché à l’original. Cloud est un personnage plus ambivalent qu’il n’en a l’air, avec de nombreux traumatismes et de questionnements sur son identité. Tifa et Aerith ont toutes les deux des peurs et des doutes qui se dévoilent au fur et à mesure de l’aventure, Barrett vit avec le poids d’une immense culpabilité, bref la troupe est en réalité bien plus humaine et profonde qu’on pourrait le croire, à condition de réussir à s’accrocher les premières heures où chaque personnage est vraiment pénible.
Et d’ailleurs, ça s’améliore durant les combats. En gros, le système génial du premier revient en étant peu ou prou la même chose avec quelques subtilités en plus, comme les attaques synchronisées ou la parade parfaite qui annule tous les dégâts. On retrouve donc le fait d’attaquer et esquiver avec une barre ATB qui permet, elle, de lancer des sorts, des compétences d’armes ou d’utiliser des objets. Un mix entre action et tour par tour très bien dosé, avec en plus un gros aspect stratégique puisqu’on peut contrôler chacun des membres du groupe, qui se limite à trois. Tout ça serait parfait si l’IA n’était pas totalement aux fraises. Par exemple, prenons le cas d’Aerith. Bien qu’on puisse en faire un DPS magique, elle est toute désignée pour être la healeuse du groupe. Donc au début, je me suis dit qu’avec elle, j’aurais pas de soucis à me faire niveau points de vie. Sauf que pour lancer le sort Soin ou la compétence Prière, ben il faut qu’elle monte sa barre ATB. Et comme l’IA est totalement dans les choux, elle n’attaque jamais et elle ne peut jamais lancer de sort. Et c’est pareil pour tous les personnages contrôlés par l’IA qui sont totalement passifs. En fait, toute stratégie est inopérante à partir du moment où on ne switch pas d’un personnage à l’autre pour leur faire monter leur barre ATB et lancer des sorts. On finit par s’y habituer avec le temps, mais c’est sacrément déroutant au début.
Du côté de l’histoire, Rebirth m’a semblé avoir le cul entre deux chaises : d’un côté, il continue de distiller des indices et de poursuivre cette relecture de l’original, et de l’autre il m’a semblé beaucoup plus timide que Remake. C’est l’épisode du milieu, celui qui n’est plus dans l’exposition mais qui ne fait pas beaucoup avancer le scénario non plus, qui sert surtout à poser les bases de la conclusion qui arrivera avec le troisième opus. Après attention, il se passe pleins de choses, mais rien de très impactant si ce n’est vers la fin du jeu. Par contre, côté mise en scène, là ça tape vraiment fort. On a le droit à des cinématiques très cinématographiques, ce qui sembler bête dit comme ça, mais ça donne quand même un fort contraste avec ce qu’on a l’habitude de voir. Y a bien sûr l’habituel champ contrechamp dans les dialogues de bases, mais l’action est très bien rendue et certaines scènes sont vraiment impressionnantes. Certains passages sont majestueux, d’autres totalement épiques, d’autres très touchants, on est vraiment dans un rollercoaster émotionnel, au moins pour les passages importants du scénario.
Mais Rebirth, c’est aussi une relecture intéressante du FFVII original. Pour approfondir un peu le propos, je vais devoir spoiler, vous voilà prévenus. Les personnages sont plus approfondis, on a le droit évidemment à de nouvelles scènes, mais aussi à de nouveaux personnages assez intrigants comme le chef du Wutai. Et bien sûr, on a donc ce multiverse qui s’annonce être central dans l’intrigue. Personnellement, je ne suis pas fan des multivers parce que j’ai l’impression d’en voir déjà partout, merci Marvel pour ça. J’étais déjà inquiet à la fin de Remake, et je le suis de nouveau en voyant la fin de Rebirth. Surtout quand on voit le développement des Kingdom Hearts, y a de quoi avoir peur. Ceci dit, j’ai bien aimé le choix fait concernant la scène mythique d’Aerith. Ma théorie, c’est que Cloud peut voir le multivers comme Aerith et Sephiroth puisqu’il a lui-même voyagé entre les mondes. Ou peut-être a-t-il simplement des hallucinations pour se protéger, on a bien vu de quoi il était capable en oubliant totalement Zack. Mais je pense pas que ça soit le cas, parce que ça n’expliquerait pas pourquoi il voit la faille dans le ciel. Reunion, qui sera à priori le nom du troisième opus, aura fort à faire pour coller tous les morceaux ensemble. Quoiqu’il en soit, je pense que l’équipe n’avait pas vraiment de bonne façon de faire concernant la mort d’Aerith, parce qu’il y aurait eu dans tous les cas des gens déçus. En l’état, j’ai trouvé la fin assez touchante, même si la scène est volontairement brouillonne et qu’on ne comprend pas grand chose.
Bon, faudrait peut-être répondre à la question qu’on se posait tous : ce Rebirth, est-il est à la hauteur ? Honnêtement, on peut ne pas aimer les choix scénaristiques, on peut ne pas aimer cette formule de monde ouvert, on peut pester sur l’IA dans les combats, on peut râler pour pleins de trucs, mais on peut pas nier qu’il est largement à la hauteur. De toute façon, peu importe les choix qui auraient été fait, ça aurait pas pu plaire à tout le monde, parce que la proposition en elle-même ne peut que diviser. Faire un remake d’un jeu aussi important que FFVII, c’est sans doute s’assurer un succès commercial, mais c’est aussi forcément déplaire à une partie des fans. Et bon, je pense que vous avez bien cerné mon avis maintenant : j’aime beaucoup ce qu’ils ont fait. Mais comme le précédent, on reste quand même sur des choix scénaristiques et de game design qui laissent place à une certaine circonspection. Je ne sais pas si y avait mieux à faire, mais en tout cas on est loin du sans faute. Est-ce que c’est vraiment ça l’important, de cocher toutes les cases du bon jeu ou du bon FF ? Je ne pense pas. Pour moi en tout cas, l’important c’est l’empreinte qu’il va me laisser. Et là dessus, il a fait plutôt fort.
Parce que… J’avais pas envie de le finir, je voulais rester un peu plus longtemps avec cette tête à claque de Cloud et ses amis. Je voulais me promener un peu plus dans le monde, mais sans avoir à faire toutes ces activités pas amusantes. Je voulais continuer de partager cette complicité avec les personnages, découvrir de nouvelles terre, vivre de nouvelles aventures. Rebirth a été pour moi comme une respiration dans un trop plein de jeux. Avec la course à la hype, au moment où cet article sera publié, on sera déjà passé au jeu d’après, et même à celui d’après encore. On ne parlera pas de Rebirth mais du prochain gros jeu sorti un mois après ou deux peut-être. Et pourtant, pour être totalement honnête, ben ça me dérange pas. J’ai aussi envie de jouer au prochain gros jeu, j’ai hâte de découvrir de nouveaux horizons, mais celui de Rebirth est sublime, et tout le temps où j’y étais, rien ne me donnait plus envie que d’y retourner.
Je n’ai pas la légitimité pour déterminer si ça sera un jeu marquant pour l’industrie, ou même dire si c’est le meilleur FF depuis X années. Par contre, je peux vous dire qu’il m’a profondément touché. J’ai souvent râlé contre lui et je trouve ça dommage d’avoir encore une fois ces satanées icones sur la cartes et ces tours insupportables à grimper. Parce que si vous êtes comme moi, c’est ultra dur de résister au besoin de tout faire. J’en avais pas vraiment envie, mais je le faisais quand même, parce que je supportais pas l’idée de tout laisser en plan. J’aimais pas me dire « non mais ça on s’en fout », même si, en fait, bien sûr qu’on s’en fout, ça n’apporte rien de très intéressant dans la majorité des cas. Mais je le faisais quand même, en étant presque dégouté de le faire, parce que je suis quelqu’un qui a besoin de cocher les cases qu’on lui dit de cocher. Et puis en prenant de la hauteur, je me rend compte que finalement, malgré tout ça, ça n’entache pas le souvenir que j’en garderais. FFVII et la trilogie Remake parlent de mémoire, et je crois que ce Rebirth est parti pour rester dans la mienne un bon moment.