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  • Test Saints Row - Un retour fracassant ?

    Par DonBear
    Publié dans Tests
    11 sept. 2022
    7 min de lecture
    Test Saints Row - Un retour fracassant ?

    Saints Row fut pendant longtemps parmi les GTA-like les plus populaires. La licence se démarquait par un côté extravagant et jusqu’au-boutiste, osant faire les blagues les plus extrêmes sans hésiter. La proposition était tranchée : soit on adhérait à l’humour et on appréciait le reste, soit le ton du jeu nous laissait sur le bas-côté et alors ce monde bac à sable n’avait plus aucun intérêt. Dix ans après la sortie du dernier en date, l’industrie vidéoludique continue d’appliquer la célèbre citation apocryphe « rien ne se perd, tout se transforme » avec le retour de la franchise. Mais a-t-elle vraiment quelque chose à apporter dans le contexte actuel ?

    L’école du rire

    Quand on y regarde de plus près, les jeux humoristiques ne courent pas les rues. On a tous en tête certains exemples dans la veine de Monkey Island, Stanley Parable ou un jeu au concept déjanté. Mais dans l’ensemble, ils ne sont pas légion. Dans le contexte de leur époque, les Saints Row apparaissaient comme des OVNI. Des jeux à l’humour souvent gras et parfois lourd, mais avec une vraie proposition ludique malgré tout. Si les titres créés pour faire rire n’étaient déjà pas nombreux, ils sont depuis quelques années devenus inexistants – osons espérer que Return to Monkey Island ne se plante pas –. Alors, lorsque j’ai lancé Saints Row, je ne savais pas à quoi m’attendre. Je craignais le pire, tout en conservant l’infime espoir d’y retrouver les mêmes tranches de rigolade que j’ai pu avoir sur Saints Row The Third. Oui, j’omets volontairement celui d’après qui allait, selon moi, un peu trop dans l’exagération.

    Et je dois dire que ce Saints Row en a, de l’humour. Sur ce point précis, il transpire la volonté des développeurs de proposer un jeu amusant. Si on reste assez loin des extrêmes atteints dans les précédents opus, ce reboot n’en reste pas moins déjanté et constamment bardé de blagues. Déjà, l’histoire principale place la barre assez haute avec sa légèreté et ses punchlines à tout-va. Elle se résume simplement : le protagoniste bosse pour une entreprise militaire, jusqu’au jour où il se fait injustement licencier. Avec ses potes Kevin, Neenah et Eli, il décide alors de créer sa propre bande pour dominer la ville. Et ça ne va pas beaucoup plus loin que ça. Les missions sont une excuse pour mettre le bazar et profiter de dialogues qu’on qualifierait difficilement de bien écrits, mais qui ne dénotent pas l’ambiance du jeu. Le je-m’en-foutisme du protagoniste crée un détachement si fort avec les événements que l’importance de tel ou tel objectif se voit séparée de toute dramaturgie. Et, finalement, ce n’est pas plus mal ! On profite du scénario sans réfléchir, et les personnages qui nous accompagnent sont attachants malgré leur manque de profondeur.

    Saints Row Screenshot

    L’histoire de Saints Row est semblable à celle d’un blockbuster hollywoodien : peu développée, mais suffisante pour accrocher ceux qui se laissent emporter. Cependant, elle aurait gagné à bénéficier d’une meilleure mise en scène. Parce qu’en l’état, on n’est pas loin du ras des pâquerettes. Les cinématiques sont molles, peu intéressantes visuellement et trop souvent dispensables. Même les scènes censées être explosives donnent l’impression de jouer à un jeu nanardesque des années 2000. La faute à une réalisation sans imagination, mais surtout à une technique au rabais – j’y reviendrais plus tard –. Ce qu’il faut retenir de l’aspect scénaristique du jeu, c’est peu ou prou la même chose que pour le reste : profiter des objectifs abracadabrantesques pour s’amuser, sans y chercher une quelconque profondeur.

    Une tonne d’activité dans une ville générique

    La grande durée de vie du jeu, elle provient de la tonne d’objectifs secondaires. Parce que de ce côté-là, Saints Row est prolifique. À Santo Ileso, jamais vous ne vous ennuierez. Il y a toujours quelque chose à faire et souvent quelque chose de tordu, comme pour le reste. Voici quelques exemples pelle mèle : conduire un camion rempli de tonneaux radioactifs, se jeter sous des voitures pour se faire balancer comme une poupée de porcelaine, mettre une note négative à un magasin pour s’attirer les foudres de ses propriétaires, jouer à un jeu de rôle grandeur nature, voler un camion en hélicoptère, etc., etc. La liste est longue, très longue, et propose une belle variété d’activités. C’est sans doute l’aspect le plus réussi du jeu : les développeurs de chez Volition ont utilisé toute leur imagination pour qu’aucune tâche ne ressemble à une autre. Avec tout ça, il y a de quoi s’occuper pendant des dizaines d’heures.

    Saints Row Screenshot

    Sauf que toutes ces aventures ne font qu’enrober une ville tristement générique. On retrouve à Santo Ileso les poncifs du monde ouvert urbain : le quartier riche et ses buildings, le désert, le quartier pauvre et ses bâtiments tristes, etc. Un constat dommageable car il y a bien quelques architectures qui sortent du lot, comme un pont aux formes rondes ou une tour futuriste. Mais ces quelques pointes de créativité se retrouvent noyées dans l’amas de designs trop fréquemment utilisés pour être appréciables. De l’architecture à l’agencement de la ville, rien de spécial n’en ressort et dispense de fait ce Saints Row d’une identité propre. Sortir un cadre de cet acabit un an et demi après Cyberpunk 2077 et presque 10 ans après GTA V, ça pique.

    Il faut dire que la ville n’est pas aidée par la technique. Visuellement, le titre semble avoir dix ans de retard et certains titres de la PlayStation 3 comme The Last of Us n’auraient pas à rougir face à lui. Certes, il s’agit ici d’un monde ouvert assez grand – mais pas immense non plus – et d’un AA au budget limité, mais ça reste en deçà des standards actuels. Dès qu’on roule au-delà de la vitesse autorisée, le clipping s’invite à la fête et tient bien en place. Les éléments s’affichent les uns après les autres, dévoilant une distance d’affichage vraiment faible. Les textures bavent, les animations sont datées et les ombres peu crédibles. Sans doute l’un des jeux les moins beaux sortis jusqu’à maintenant en 2022. Et c’est sans compter la palanquée de bugs. Certains sont drôles et concordent avec l’ambiance du jeu, comme la physique qui fait n’importe quoi et apporte finalement un certain charme aux collisions. Mais les bugs handicapants pullulent. Les crashs, les sous-titres décalés voire non traduits – sans compter l’absence d’options d’accessibilité –, les animations loupées ou encore les bugs bloquant comme des PNJ qui ne réagissent pas ou le personnage bloqué dans le décor donnent plutôt l’impression d’avoir en face de soi un jeu qui mériterait un gros coup de polish.

    Saints Row Screenshot

    Et comme si ça ne suffisait pas, son game design intensifie le sentiment d’être dans une capsule temporelle. Dans les mondes ouverts actuels, la mode va plutôt aux tours qui dévoilent la carte, aux camps d’ennemis et à la progression de l’exploration petit à petit. Dans le cas présent, rien de tout ça : dès l’introduction terminée, vous pouvez aller où vous voulez et les activités sont disséminés dans toute la ville. La plupart des objectifs tertiaires sont annotés sur la carte, et il n’y a pas vraiment de camp d’ennemis. C’est simple : on se croirait en 2010, avant l’arrivée des mastodontes comme The Witcher 3 qui ont édicté le modèle à suivre. Un mal pour un bien dirons-nous, mais qui reflète une fois de plus le retard accumulé par Volition dans la compréhension des codes vidéoludiques actuels.

    Du grand n’importe quoi

    Ce qui rattrape un peu le tout, c’est la personnalisation. Elle est au cœur de ce nouvel opus et s’avère être une franche réussite. Les choix de visages par exemple sont nombreux et souvent drôles, les vêtements sont variés et le nombre de possibilités est mirobolant. Ce qui est d’autant plus impressionnant lorsque l’on se rend compte qu’il est possible de personnaliser énormément d’éléments : le personnage principal et ses vêtements – ainsi que ceux de ses potes –, mais aussi les armes, les véhicules, le quartier général du gang et j’en passe. On peut même choisir le symbole utilisé pour la censure ! Et pour chacun de ces composants, le sens du détail est poussé à son paroxysme. Un travail titanesque de la part de Volition qui amusera sans aucun doute les amoureux d’esthétique et les occupera pendant des heures.

    Saints Row Screenshot

    Mais ce qui compte vraiment dans un Saints Row, c’est de pouvoir faire n’importe quoi. Et de ce côté-là aussi, c’est plutôt la joie : on a affaire à un vrai jeu de bourrin. Foncer sur les véhicules et les voir s’encastrer dans un mur, se lancer au milieu d’un tas d’ennemis tel un Rambo en puissance, ou encore utiliser un tank pour tout exploser donne un grisant sentiment de puissance. Ça pète de partout, c’est fun, et la progression rapide du personnage grâce à l’acquisition d’aptitudes et de talents offre rapidement les capacités de faire ce qu’on veut. Que ce soit sur terre, en l’air ou en mer, aux poings ou à la mitraillette, dans un tank ou dans un hélico, on comprend vite que le jeu ne veut pas qu’on y aille de main morte.

    Alors on lâche la bride, et on aperçoit rapidement les limites du gameplay. Parce que Saints Row a beau être fun, il n’en reste pas moins doté d’une jouabilité digne – encore une fois – des TPS des années 2010. La rigidité des gunfight pousse à l’immobilisme, malgré la présence de roulades dont les frames d’invulnérabilité octroient des déplacements sans dangers. À vrai dire, je ne vois pas de grande différence avec les précédents Saints Row. Mais pas d’inquiétude, l’IA en face est tellement à côté de ses pompes qu’il sera aisé d’en venir à bout. Elle se met peu à couvert, ne cherche que rarement à vous encercler et fait n’importe quoi de manière générale. La plus grande difficulté provient des différents types d’ennemis qui peuvent rapidement être difficiles à gérer : on a d’un côté ceux qui viennent au corps à corps, ceux qui ont des capacités spéciales comme le fait d’être protégé des balles, etc. Mais dans le fond, la variété d’ennemis fait globalement la même chose : vous foncer ou vous tirer dessus dès qu’elle vous voit. Le changement de la difficulté du jeu ne fait qu’altérer le nombre de points de vie des ennemis et les dégâts que vous faites.

    Saints Row Screenshot

    Alors, ces 9 quartiers de Santo Ileso sont-ils à la hauteur ? Le côté gestion du gang est assez intéressant, avec le placement d’entreprises qui amènent des objectifs secondaires amusants. La progression visuelle du quartier général à travers l’ajout de décoration est elle aussi agréable et reflète notre propre progression. Et je n’ai pas testé la coop, mais il ne fait aucun doute qu’elle doit apporter de l’amusement supplémentaire. Mais dans sa globalité, le jeu reste décevant par son game design poussiéreux, sa technique à la ramasse et son gameplay rigide – que ce soit dans les gunfight ou la conduite très arcade –. On retrouve avec plaisir les codes de la série et l’humour distinctif de la licence, mais ce sont bien les seuls éléments qui feront plaisir aux fans.

    Points positifs


    L'humour dans la veine des précédents...
    Quelques architectures loufoques... Une grande variété d'activités...
    Un jeu bourrin
    La personnalisation du personnage, de la ville, des armes...

    Points négatifs


    ...Et donc pas toujours drôle
    ... Dans une ville générique
    ... Qui s’essouffle sur la durée
    Une mise en scène au rabais
    Une pelletée de bugs
    Une IA à côté de ses pompes
    Un gameplay rigide

    6
    Sympa sans plus
    Saints Row n'est pas un mauvais jeu en soi. On peut facilement s'amuser dessus, profiter des situations rocambolesques et des punchlines dignes de Saints Row The Third, et foutre le bordel en ville. Et c'est sans compter les nombreuses activités qui diversifient le gameplay. Mais Saints Row est un jeu sorti avec 10 ans de retard. Il représente une sorte de capsule temporelle, comme le montre sa structure de monde ouvert. Sa technique aussi rappelle les années 2010, tout autant que sa mise en scène molle et son gameplay rigide. Les gros fans de la licence trouveront de quoi s'amuser, les autres le laisseront de côté pour jeter un oeil à la pelletée de monde ouverts en connivence avec leur époque.

    Tags

    Monde ouvertTPSTHQ NordicPS5

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    DonBear

    DonBear

    Fondateur

    DÉVELOPPEUR :

    Volition

    ÉDITEUR :

    THQ Nordic

    DATE DE SORTIE :

    23 août 2022

    PLATEFORME :

    PlayStation 4/5, Xbox One/Series, PC

    PRIX À LA SORTIE :

    59,99

    Testé sur PS5 grâce à un code fourni par Plaion

    Sommaire

    1
    L'école du rire
    2
    Une tonne d'activité dans une ville générique
    3
    Du grand n'importe quoi

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